Dans cet article, nous allons tenter de faire le tour de la question du Timecode.
Du jam au Timecode audio, nous aborderons les aspects techniques du signal TC, les métadonnées du fichier .bwf et les bonnes pratiques pour éviter un coup de fil douloureux de la post-production.
L’histoire du Timecode commence dans les années 1960, avec l’apparition de “sync tones”, de courts extraits de signal numériques inscrits sur les bandes magnétique contenant des données de synchronisation. En 1969, la SMPTE définit le standard 12M qui introduit le Timecode LTC qu’on connaît aujourd’hui, pour mettre fin à la prolifération de formats de synchronisation propriétaires à l’époque.
Avec l’apparition des supports numériques, il est devenu possible d’inscrire dans les fichiers des informations supplémentaires. Dès lors, il “suffit” que tous les enregistreurs – audio et vidéo – partagent une horloge commune, et qu’ils notent le moment auquel ils commencent à enregistrer pour pouvoir les synchroniser à nouveau sans problème. C’est le principe du Timecode. Pour l’audio, à chaque pression sur le bouton “REC”, l’enregistreur lit la valeur de l’horloge TC, la convertit au bon format, et l’écrit dans l’en-tête du fichier bwf. Le logiciel de montage peut donc replacer sur une timeline chaque enregistrement puisqu’il peut lire l’heure exacte du début du fichier.
L’Horloge Timecode
L’horloge TC est une horloge standard heures, minutes, secondes qui comporte un champ supplémentaire sous la seconde pour le numéro d’image. Le Timecode est accordé à la fréquence image de la caméra, et il existe donc plusieurs réglage possibles :
- 24 Drop-Frame (23.98)
- 24
- 25
- 30 Drop-Frame (29.97)
- 30 No-Drop
Les réglages Drop-Frame existent pour la compatibilité avec les fréquences images de la TV couleur aux USA et sont rarement utilisés en europe (plus d’info ici).
L’ horloge TC est donc au format HH:MM:SS:FF avec F pour Frame (image).
Le signal LTC
Avec ce fonctionnement, toute la difficulté consiste à avoir une horloge stable, partagée par les enregistreurs et les caméras, avec un minimum de complexité. Or, il s’avère que la plupart de ces appareils possèdent déjà un circuit d’horloge TC (à ne pas confondre avec l’horloge horaire, moins précise). Il suffit donc de décider quel appareil est maître, et de synchroniser les autres à son Timecode. C’est là qu’intervient le signal LTC, qui sert à transporter en temps réel la valeur du Timecode d’un appareil à l’autre. Le signal LTC est un signal électronique encodé en manchester différentiel, dont la bande passante est entièrement contenue dans la bande audio et qui contient l’horaire donné par l’horloge Timecode. Le signal LTC est le plus souvent disponible sur des connecteurs BNC ou Lemo5, parfois mini-jack 3.5mm, et son amplitude est comparable au niveau Ligne.
Jammin’
Pour synchroniser deux appareils disposant d’horloges TC, il suffit de régler le Timecode sur l’un d’entre eux (le “maître”). On les relie ensuite via un câble transportant le signal LTC. Sur l’appareil à synchroniser, après avoir réglé la fréquence image, on accède au menu Jam. On peut alors voir le TC entrant et le TC interne de la machine. Il suffit d’activer le Jam pour que l’horloge interne prenne la même valeur que le TC entrant! Sur certains boîtiers, le jam est automatique, certains détectent même automatiquement la fréquence image. Il vaut mieux se référer aux manuels en cas de doute.
Qui est maître?
Il serait logique de penser que comme le Timecode est synchronisé à la fréquence image, c’est la caméra qui le génère en priorité. En pratique, c’est rarement le cas. En effet la plupart des caméra ont une horloge TC peu fiable, voir pas d’horloge du tout (ou plutôt, aucun moyen d’accéder à l’horloge via un signal LTC). Par contre, les enregistreurs audio intègrent généralement une horloge très stable. On a en réalité deux choix possible pour décider qui est maître : Soit l’enregistreur, soit un boîtier TC externe.
La dérive
Pour synchroniser des horloges entre elles, il faut les faire partir en même temps. Mais ça ne suffit pas, il faut également qu’elles tournent à la même vitesse car sinon, la différence s’accumule à chaque instant et une erreur finit par apparaître. On appelle ce phénomène la dérive (drift). On qualifie la capacité d’une horloge TC à rester synchronisée à une horloge de référence en ppm (partie par million). Par exemple le Tentacle Sync-e annonce une précision de 0.2ppm : cela signifie que son horloge affiche une erreur de 0.2s par rapport à une horloge de référence au bout d’un million de secondes, soit plus de 11 jours! Quand on compare deux horloges TC entre elles, il convient d’additionner les dérives pour estimer le pire cas. En pratique, la valeur en ppm n’est pas très utile et on préfère quand le fabricant indique au bout de combien de temps une erreur d’une image risque d’apparaître. Entre deux Tentacle Sync-e, c’est au pire une image de décalage au bout de 24 heures.
Les boîtiers Timecode
Comme dit précédemment, les caméras ont généralement une horloge peu stable. Comme les dérives s’accumulent, si on synchronise l’enregistreur (stable) à la caméra, la dérive totale sera au moins égale à celle de la moins bonne horloge, et donc le système dérivera rapidement, en entraînant des erreurs difficiles à corriger par la suite. C’est la raison d’être des boîtiers Timecode. Ce sont des boîtiers compacts et légers que l’on fixe sur les appareils à synchroniser, et qui possèdent des horloges stables les unes par rapport aux autres. On peut même resynchroniser certains modèles à la volée via Bluetooth. Dans l’idéal, on synchronise tout le matin, et les boîtiers restent synchrones toute la journée. Une bonne autonomie de batterie est donc un gros avantage pour un boîtier Timecode.
Normalement, avec un tel système, la synchro devrait être facile : On génère le TC avec des boîtiers synchronisés, on l’envoie aux caméras et enregistreurs via leurs entrées LTC, qui écrivent ce Timecode dans les métadonnées de leurs fichiers audio ou vidéo, pour pouvoir finalement les aligner automatiquement dans un logiciel de montage. Mais il reste un cas problématique : que faire si la caméra n’a pas d’entrée LTC ?
Le Timecode Audio
Si la caméra (ou l’enregistreur) n’a pas d’entrée LTC, il reste une solution de secours. Comme évoqué plus haut, le signal LTC peut s’apparenter à un signal audio niveau ligne. On peut donc enregistrer ce signal sur une piste audio de la caméra, en prenant soin d’atténuer si besoin le signal ; en effet généralement les DSLR ont une entrée audio niveau micro. Avec un logiciel comme Tentacle Sync Studio on peut ensuite lire le signal LTC sur la piste audio et l’écrire dans les métadonnées du fichier avant de le réexporter (certains logiciels de montage proposent également cette option).